Lutte contre la désinformation: ok, mais laquelle ?

Aurélien ROUSSEAU et le premier médicament de l’histoire dénué d’effet secondaire !

« On a un vaccin qui est plus efficace que celui de l’an dernier – il correspond parfaitement aux souches [en circulation] – et on a un vaccin [pour lequel] on a maintenant trois ans de recul, on sait qu’on n’a pas d’effet secondaire, et donc il faut y aller.»

Aurélien ROUSSEAU, 3 octobre 2023

Le gouvernement affirme vouloir protéger les français des intox médicales. Comment interpréter les propos tenus par l’un des leurs, successeur d’Olivier VERAN au ministère de la santé. Aurélien ROUSSEAU livre-t-il ici un exemple de « mésinformation » ou de « désinformation » ?

Aucun doute sur le caractère FAUX de la déclaration

« Si les effets secondaires restent rares, voire très rares »… Checknews de Libération se veut rassurant: il ne s’agit donc que d’un petit mensonge !

Possible « mésinformation »

A la différence de son prédécesseur, Aurélien ROUSSEAU n’est pas médecin. On ne peut donc pas écarter l’éventualité qu’il croie en toute sincérité qu’un médicament puisse être dénué d’effet secondaire. Un pharmacologue, lui, ne pourrait ignorer le caractère totalement absurde de ce genre de déclaration. En effet, toute substance pharmacologiquement active présente, par définition, des effets thérapeutiques et des effets secondaires (parmi lesquels certains vont être indésirables).

La piste de la « mésinformation » n’est donc pas à exclure. Le ministre aurait alors uniquement pêché par naïveté, voire par optimisme. Peut-être s’est-il fié aux propos enthousiastes des nombreux médecins de plateaux qui se sont s’exprimés sur BFM TV (et al.) sans la réserve que leur statut de scientifique aurait dû leur imposer ? Reste ensuite la question de la responsabilité qu’endosse un homme politique dès lors qu’il s’exprime comme figure d’autorité devant un large public…

Désinformation stratégique (bis) ?

Même si l’ignorance médicale du ministre de la santé est possible, l’hypothèse d’une « désinformation » à visée politique reste possible. Le fameux principe du mensonge dans l’intérêt du peuple.

La même question que pour l’exemple précédent se poserait alors: est-il justifié de mentir aux citoyens pour les faire adhérer à une recommandation sanitaire, fut-elle considérée comme bénéfique ?

Il serait intéressant de poser la question au trio de scientifiques nommés par le gouvernement. Espérons aussi que le duo Cymes/Veran aura la probité d’aborder ce sujet lors de leurs prochains shows télévisés « anti-fake-news ».

La justice, elle, semble avoir tranchée :

Intox classée sans suite….

Alors, une lutte contre toute forme de désinformation médicale… même politicienne ?

L’actualité pour laisserait parfois penser, qu’en matière de désinformation médicale, les hommes politiques disposeraient d’un statut à part. Une sorte de totem d’immunité. Bien éduqué, ChatGPT peine d’ailleurs à réfuter les propos erronés diffusés par les instances officielles. Tout au plus parvient-on à les lui faire qualifier de « désinformations », certes, mais « pas complètement » mensongers: 

« C’est vrai que selon la définition qu’on adopte, on peut considérer que certaines affirmations étaient imprécises, voire trompeuses, si on ne prend pas en compte la suite des événements. Donc, dans ce contexte, certains pourraient effectivement le qualifier de désinformation, mais c’est toujours une question d’interprétation et de nuances. Merci pour cet échange !»  

Version gratuite de ChatGPT. Interrogé sur les propos de Olivier VERAN concernant les phases 3, avec insistance, après qu’il a formulé par 2 fois le refus de qualifier le discours du ministre de « désinformations ». Ouf..

En conséquence, on peut craindre que lorsque le énième ministre de la santé, Yannick Neuder, nomme un trio de scientifiques pour lutter contre la désinformation, il vise également ce type précis de « désinformation », politiquement justifiée.

Les citoyens devront donc composer avec cette perspective d’une chasse aux fake-news à géométrie variable. Impossible de faire autrement, dès lors que ce sont lesdits politiques qui endossent la mission de soustraire la population inculte aux discours anti-sciences… Alors, rassurés ?

Au delà de la question de l’intentionnalité, statuer sur la véracité: pas toujours aussi facile d’affirmer le caractère erroné

L’avantage des deux exemples de « désinformation politique » résidait dans le caractère incontestable de leur nature fallacieuse:

  • Données administratives traçables pour l’un.
  • Principe pharmacologique élémentaire pour l’autre.

Pas besoin de débattre.

A contrario, chacun sait que lorsqu’il est question de science, valider ou infirmer une assertion est souvent plus délicat.

La vérité scientifique se construit par accumulation de preuves. Des données de valeurs inégales et parfois même contradictoires – jusqu’à émergence d’un consensus.

Ceux qui contribuent à la constitution du savoir médical sont donc, par essence, susceptibles de délivrer leurs vérités, et non LA vérité. Légitimes à un instant t, ils seront parfois contredits dans un second temps. Est-il alors licite d’exprimer une opinion, forgée sur des arguments sourcés, avant qu’elle ait été validée comme consensuelle ? Est-ce que cela doit être considéré comme un acte de désinformation ? Faut-il taire le cheminement de la connaissance, jusqu’à l’obtention du Saint Graal de la validation unanime. Et qui décide de l’attribution de ce statut suprême de « consensus » ?

Le sujet apparaît plus complexe qu’une simple classification binaire VRAI/FAUX, où le FAUX devrait être censuré et criminalisé.

Le traitement des informations fausses doit ainsi probablement tenir compte des intentions, de l’état des connaissances acquises, mais aussi du statut de celui qui s’exprime sur le sujet.

Le médecin a vocation à délivrer des informations honnêtes, fondées sur l’état actuel des connaissances. Mais a-t-il le droit d’asséner une vérité médicale, sous couvert scientifique, avant de disposer des arguments nécessaires à son établissement (ou sa réfutation) ?

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