Vaccination anti-COVID des 12-15 ans: l’Angleterre pense utile de réfléchir, la France non

Nous proposons une traduction d’un article paru durant le mois de Septembre 2021 dans le British Medical Journal. Il s’agit d’un éditorial intitulé: « Vaccins anti-COVID pour adolescents: discussions et consentements »

Saxena S, Skirrow H, Bedford H, Wighton K. Covid-19 vaccines for teenagers: conversations and consent

doi:10.1136/bmj.n2312

 

 

Les auteurs abordent les lourds enjeux médicaux et sociétaux que soulèvent l’acte de vaccination contre le SARS-COV2 étendu aux adolescents de 12 à 15 ans.

Le 13 septembre, les Hautes instances de santé publique britanniques ont recommandé que les 12-15 ans se voient administrer une unique dose de vaccin Pfizer-BioNTech contre la covid-19. Cette décision succède à une précédente recommandation du « Comité paritaire pour la vaccination et l’immunisation » de ne pas préconiser de vaccin anti-COVID pour cette même classe d’âge.

Le Royaume-Uni rejoint donc désormais un nombre croissant de pays prônant la vaccination dès 12 ans. Il ne recommande en revanche qu’une seule dose, plutôt que les deux administrées dans d’autres pays. Cette restriction reposent sur les préoccupations portant sur de rares effets secondaires. Parmi elles,  l’inflammation cardiaque.

 

Un enjeu médical, logistique mais aussi éthique.

Les bénéfices de la vaccination contre le covid-19 sont mineurs pour ce groupe d’âge. L’infection par le covid-19 ne constitue pas une menace sérieuse pour leur santé. Cependant, cette décision du conseil de santé publique a été influencée par l’objectif d’éviter de nouvelles perturbations scolaires.

Les parents sont naturellement préoccupés par la sécurité des vaccins.

De plus, on ne sait pas encore comment les écoles et les professionnels de la santé vont pouvoir répondre aux questions des parents et aider les adolescents à prendre des décisions éclairées. Il s’agirait de gérer jusqu’à 2,6 millions de vaccins contre le covid-19.

 

Intérêts de la vaccination chez les jeunes

Les arguments en faveur de la vaccination contre le covid-19 pour les adolescents en bonne santé sont moins convaincants que ceux qui justifient les autres vaccins préconisés chez l’enfant. Les vaccins qui composent le calendrier vaccinal classique présentent des avantages directs pour les individus et bénéficient de nombreuses années de données de sécurité.

Les adolescents en bonne santé courent un risque extrêmement faible d’hospitalisation et de décès pour infection à covid-19. Les vaccins anti-COVID sembleraient bien protéger contre des symptômes tardifs tels que les maux de tête et la fatigue. Ils ne peuvent durer au-delà de 12 à 16 semaines que chez une très faible proportion d’adolescents.

Enfin, les éventuels bénéfices peuvent être limités par le fait que 30 à 50 % des adolescents pourraient bien avoir déjà acquis une immunité naturelle contre le covid-19.

 

Effets secondaires

La plupart des adolescents âgés de 12 à 15 ans qui ont reçu le vaccin Pfizer-BioNTech, lors d’essais cliniques ou lors d’une vaccination de masse en Amérique du Nord, n’ont signalé que des effets secondaires mineurs et transitoires. Le plus souvent, malaises et douleurs au point d’injection (79-86 %). D’autres réactions incluent de la fièvre, fatigue et douleurs musculaires (64 %) et maux de tête (49 %) pouvant durer jusqu’à une semaine.

Cependant, quelques cas d’inflammation cardiaque (péricardite et myocardite) ont été signalés. Ils affectent plus les garçons que les filles.

Le risque de la myocardite après ce vaccin passe de 3 à 17 cas par million après une dose, à 12 à 34 cas par million après la deuxième injection. C’est ce qui a motivé la décision du Royaume-Uni de n’administrer qu’une seule dose aux moins de 16 ans. À ce jour, aucun décès n’est survenu à la suite d’une myocardite après la vaccination, mais les effets à long terme sont inconnus. Le risque de myocardite associé à l’infection par le covid-19 pourrait être plus élevé qu’après la vaccination, mais des recherches supplémentaires restent nécessaires pour évaluer le risque par rapport aux avantages. Il est important de noter qu’une infection passée par le covid-19 ne semble pas augmenter le risque de myocardite après la vaccination.

 

De potentiels désaccords en vue

La délivrance d’information sur la vaccination des adolescents âgés de 12 à 15 ans contre le covid-19 s’avère plus difficiles pour les professionnels de santé. Le dossier scientifique est plus faible pour les adolescents que pour les adultes.

Plus de la moitié des parents dans les écoles secondaires britanniques déclarent vouloir absolument que leur enfant soit vacciné. Néanmoins, 40 % d’entre eux ne sont pas sûrs.

En revanche, 89 % des jeunes âgés de 16 et 17 ans déclarent n’avoir aucune hésitation à propos du vaccin contre le covid-1911 – à part des préoccupations accessoires telles que l’anxiété au sujet des aiguilles. Plus de la moitié ont reçu leur première dose dans le mois suivant leur éligibilité. Le Collège Royal de Pédiatrie et de Santé infantile sollicite maintenant l’avis d’enfants de 12 à 15 ans. De toute évidence, il existe un réel risque des désaccords entre les adolescents et leurs parents. On peut anticiper également que les adolescents et les familles soient l’objet de pression ou victime de stigmatisation si leurs décisions diffèrent de celles de leurs pairs et de la communauté scolaire au sens large.

 

 

Recueil de consentement

Les procédures de consentement pour les vaccins contre le covid-19 dans les écoles seront gérées par des équipes des services scolaires de vaccination expérimentées. C’est déjà le cas avec le recueil d’un consentement éclairé pour la vaccination contre le papillomavirus (HPV) et pour d’autres programmes. Le consentement des parents sera demandé, mais les enfants de moins de 16 ans ont la capacité de comprendre les risques et les avantages. Ils peuvent donc fournir leur propre consentement. Celui-ci aura la primauté sur le point de vue des parents.

Des experts ont remis en question la validité d’un quelconque consentement éclairé alors que les données de sécurité n’ont pas encore fini d’émerger. Certaines familles peuvent reporter ou refuser de donner leur consentement s’ils conservent des questions ou s’il existe des conflits non résolus avant la venue des équipes de vaccination en établissement scolaire.

 

Un effort indispensable de communication

Public Health England a publié des informations à destination des enfants et des parents. Mais les familles peuvent également choisir de demander conseil à des professionnels certifiés par le National Health Service. Il s’agit de médecins généralistes et d’infirmières, qui ont toujours été des acteurs clés pour la prise de décision des patients concernant les vaccins. Communiquer avec les familles, recueillir les consentements et vacciner jusqu’à 2,6 millions de jeunes augmentera considérablement la charge de travail actuelle des médecins généralistes, des infirmières et des équipes de vaccination scolaire. Ces-derniers sont déjà surchargés en raison du rattrapage des vaccinations de routine interrompues pendant la pandémie.

Une communication spécifique et une implication des représentant des différentes communautés seront nécessaires pour surmonter les obstacles liés à la langue ou l’absence d’accès à la littérature numérique.

 

Promotion avec incitation à la vaccination ou respect des décisions souveraines de chacun à la lumière des informations objectives ?

Le Royaume-Uni pourrait prendre exemples sur d’autres pays. Il faut produire des informations accessibles et pertinentes dans des formats conviviaux sur les réseaux sociaux. Ces outils viseraient à permettre aux adolescents et aux familles de prendre des décisions éclairées. Les États-Unis ont introduit des programmes de promotion des vaccins entre pairs tels que le covid-19 Student Corps19. Un lycéen a mis en place le site VaxTeen20 fournissant des ressources aux jeunes sur des sujets tels que comment parler à vos parents des vaccins. Aux États-Unis, plus de 12 millions d’adolescents âgés de 12 à 17 ans ont désormais reçu une dose.

Les professionnels du NHS présents dans le service de vaccination scolaire et les soins primaires doivent disposer de temps et de connaissances solides. Cela doit faciliter les échanges avec les jeunes et leurs parents, sans pression ni jugement.

Quelles que soient les décisions des adolescents et des familles, leurs opinions doivent être entendues et respectées.

 

 

« Leurs opinions doivent être entendues et respectées« …. Pendant ce temps, en France, le Pass Sanitaire est étendu aux enfants dès 12 ans…

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